Elle a permis, depuis 1984, à plusieurs centaines d’heureux stagiaires, de devenir de vrais professionnels des arts graphiques et du multimédia. Avec un taux de professionnalisation réussie de l’ordre de 80% pour les étudiants, les prix les plus bas du marché, une excellente équipe enseignante et une ambiance de travail inimitable, cette structure devrait connaître un succès inégalé auprès des institutions chargées d’organiser la formation professionnelle. Or il n’en est rien et à notre grande stupéfaction, l’école est au bord du dépôt de bilan. Explications.

Le directeur, Michel Riboulet, est désemparé : « Dés le départ, nous avons choisi d’avoir une démarche sociale : gestion associative, prix bas, public varié) ; tout naturellement, notre interlocuteur a été l’Etat (ASSEDIC, CLI, DDTE, ANPE, etc.), qui finançait les formations pour les demandeurs. A la suite de la politique de décentralisation, la formation professionnelle a été mise sous la tutelle de la Région qui a peu à peu diminué les prises en charges ». De ce fait, l’Ecole Brousse voit décliner son activité, et pour cause : n’étant plus financés, les éventuels clients n’ont plus qu’à se résoudre à s’orienter vers les secteurs reconnus (BTP, hôtellerie, restauration, etc.). Nombreux, déçus, abandonnent alors tout projet personnel.

L’Ecole Brousse va ainsi passer de 12 à 2 salariés, avec un grand sentiment d’injustice : « Nous ne comprenons pas comment ce secteur peut être abandonné de la sorte : formation, éducation, recherche, sont pourtant des pôles d’excellence à favoriser pour le futur. Ce futur passe obligatoirement par une communication efficace et moderne. Développer les formations qui s’appuient sur l’informatique devrait être une action prioritaire ; tous les décideurs le reconnaissent ».

De fait, nous avons rencontré à l’Ecole Paul Brousse un public très demandeur en PAO (publication assistée par ordinateur) et en Web design (fabrication de sites en ligne). Si pour la première activité, le marché semble se tasser, la seconde est en pleine expansion et les besoins immenses. C’est qu’il s’agit de véritables métiers, qui demandent un apprentissage poussé avant d’être exercés. Michel Riboulet souligne le fait que ce professionnalisme pointu est masqué, peu perçu : « Le grand public, inondé d’images, confond voir et faire ; pense savoir faire mais n’a jamais le temps. Les ouvrages de vulgarisation se vendent par centaines dans les grandes surfaces, mais n’ouvrent, quand ils sont lus, que des horizons limités et quelque part induisent en erreur. Il faut aller bien plus loin professionnellement ».

Michel Riboulet tente d’analyser le pourquoi du quiproquo autour de ce métier qu’il assimile à de la création artistique : « Souvenez-vous, les situationnistes disaient : L’Art, c’est l’acte. Malheureusement, ce qui a été compris de leur message, c’est qu’il suffisait de faire et quelque part, cette phrase a banalisé l’acte de création, l’a vidé de sa culture et de ses apprentissages. Les artistes eux-mêmes ont toujours voulu masquer leur effort, apparaître un peu comme des démiurges qui créeraient dans la facilité, alors que tout leur art repose sur un travail titanesque ! ».

On comprend mieux alors comment s’est construit le processus qui a fait que ce type de formation ait pu paraître mineur aux yeux des institutionnels et les ait conduits à financer d’autres filières. Des gens en recherche de savoir-faire, en situation plus ou moins précaire, très motivés (nous l’avons constaté) ne peuvent se payer sur leurs fonds propres des semaines de formation, même à 4 € de l’heure. A cela s’ajoute le fait que l’Ecole Brousse n’a jamais souhaité organiser de campagnes de communication auprès du grand public, ce que n’hésitent pas à faire les structures concurrentes, qui travaillent elles dans un esprit très différent (prix, public).

Alors, quelles solutions ? Michel Riboulet en appelle au Président de la Région Languedoc Roussillon, ainsi qu’à tous les responsables de la formation continue et professionnelle régionaux. L’Ecole Brousse va répondre en avril à un appel d’offres régional dont l’acceptation serait la solution qui permettrait le maintien de cette structure exceptionnelle (un espace de travail de 500 mètres carrés, tout équipé en plein faubourg Figuerolles, à deux pas d’un arrêt de bus). Il n’exclue pas non plus de proposer ses services à la municipalité : « En échange du maintien de nos salariés, nous pourrions offrir des formations cette fois gratuites aux adolescents, associations, enseignants, retraités. Nous avons beaucoup de demandes et nous aidons déjà bénévolement en fonction des projets qui nous sont présentés ». Gageons que cet appel pathétique sera entendu…

Contact : Ecole Paul Brousse, 50 bis rue du Faubourg Figuerolles, 34070 Montpellier. tel. 04 67 92 35 68 ; sur le net : http://ecolebrousse.free.fr